J'ai eu une réunion aujourd'hui avec quelqu'un que je connaissais pas et il m'a dit "ton parcours est impressionnant !". Sur le coup, je l'ai remercié poliment mais j'avoue que ça m'a fait cogiter un peu. En fait, beaucoup. Parce que pour être tout à fait honnête, je suis très heureux de ce que je fais aujourd'hui, d'où je suis et de qui je fréquente, mais quand je prends le temps de regarder en arrière j'ai l'impression que tout mon parcours est une succession d'échecs ! Et c'est vrai. Je veux dire, factuellement, c'est vrai. Je me demande donc comment ces échecs se sont-ils transformés en opportunités au point que mon parcours puisse paraître "impressionnant" ?

L’échec de ma vie

Je vois déjà les risées à la lecture de ce qui va suivre, mais puisque nous y sommes, autant mettre les deux pieds dans le plat. Quand j’étais plus jeune, mon rêve absolu étant d’entrer dans les rangs du Groupement d’Intervention de la Gendarmerie Nationale, le GIGN. J’étais déterminé et m’entrainais tous les jours pour y arriver. À l’époque j’étais au chômage, je ne faisais rien de mes journées à part du sport. Deux heures le matin, une heure le midi, deux heures le soir. Mon seul et unique objectif : cartonner les tests de sélection de la gendarmerie. Alors quand j’ai passé ces fameux tests à Amiens, autant dire que j’ai tout donné. Tant et si bien que j’ai battu le records de la caserne. Oui, rien que ça. (Attendez attendez, l’échec arrive…)

S’en sont suivi les tests écrits, puis l’entretien avec un officier. Ce dernier m’a fait savoir qu’il était pressé que j’intègre la gendarmerie et qu’il voulait des jeunes comme moi dans son équipe. J’étais saucé et sûr d’être accepté. Après tout j’avais travaillé si dur, ça me semblait mérité. Enfin, j’ai reçu une convocation surprise pour un entretien avec un psychologue. Deux semaines plus tard je recevais un courrier type m’informant que « je ne correspondais pas au profil recherché » et que « merci pour ma participation ». Ni plus, ni moins. S’ils avaient ajouté « Surtout, garde bien la pêche. Cordialement. » ça ne m’aurait pas surpris. Je peux dire maintenant, sans l’ombre d’un doute, que cette lettre était, à cet instant, l’échec de ma vie. Vous imaginez ? Me faire recaler par un psychologue alors que tous les compteurs étaient au vert ? J’ai longtemps pensé que j’étais un socio-psychopathe, schizophrène en puissance qui s’ignore. Quand je reparlais de cette anecdote avec mon père et il me rappelait à quel point j’étais au fond du trou, que je me plaignais d’avoir raté ma vie, de n’être bon à rien, etc. Qu’est ce que j’ai pleuré suite à cet échec…

… C’était sans compter qu’à l’entrainement, je rencontrerais ceux qui seraient mes premiers clients une fois ma société créée ! Notamment Yacin Berrabah, avec qui je m’entrainais, entrepreneur dans l’âme et boxeur hors pair, qui serait mon tout premier client avec le gala de boxe qu’il organisait à l’époque.

échec en opportunité

Cauchemars en comptabilité

Pendant six ans, j’ai dirigé la société Aaron Brainwave. C’était ma société, mon bébé. À la base, je ne voulais pas particulièrement être entrepreneur. Je m’étais lancé en tant qu’auto-entrepreneur pour pouvoir facturer quelques prestations de design… puis j’ai atteint le plafond de facturation que permet ce statut, donc la société s’est imposée à moi. C’était une grande expérience malgré tout, j’ai adoré et j’ai beaucoup appris. (Patience voyons, l’échec revient…)

Le domaine sur lequel j’ai le plus appris, c’est la comptabilité. Et je peux vous dire que je l’ai appris dans les larmes suite à deux contrôles fiscaux. Franchement, j’étais au bout du rouleau. Passer mes nuits à rechercher des factures, à en refaire d’autres, à prendre conscience que mes déclarations n’étaient pas du tout à jour… et se retrouver au final avec une dette fiscale plus importante que tout ce que j’aurais jamais pu imaginer. Ça a été un choc très difficile à encaisser, je n’ai pas peur de le dire. J’ai eu peur de ne jamais pouvoir me sortir de ces dettes d’impôts, d’URSSAF, de CIPAV, etc. Si vous avez déjà été amené.e à gérer une entreprise, imaginez vous manger un redressement qui représente environ 35% de votre chiffre d’affaires. Si vous n’avez jamais géré d’entreprise, imaginez vous manger un coup de pied de Tony Jaa dans la figure. Voilà, l’effet que ça m’a fait.

Mais voilà, c’était il y a bientôt cinq ans maintenant. Depuis j’ai dormi, de l’eau a coulé sous les ponts. J’ai passé l’éponge et tournée la page. Comme 4 entreprises sur 10, j’ai fermé juste après 5 ans d’activité. Et vous connaissez la meilleure ? Mon métier maintenant, c’est la finance et la comptabilité. Et puisque chat échaudé craint l’eau froide, je propose même quelques conseils quant à la comptabilité sur ce blog ! Ce serait mentir que de dire que tout avait été planifié. Bien sûr, avec le recul c’est facile de trouver une suite logique dans les évènements. Mais la vérité c’est que si on m’avait dit il y a dix ans que j’orchestrerais les finances de huit filiales à travers le monde, moi qui n’avait aucune formation ni en finances d’entreprise, ni en comptabilité et qui ne parlais aucune langue étrangère, je n’y aurais jamais cru ! J’aurais sûrement même pensé : « quel avenir ennuyant ! De la com-pta-bi-li-té ? Sérieusement ?! »… Et pourtant, me voilà qui adore mon travail !

« Il ne faut jamais blâmer une contrariété »

Maman de mon meilleur ami

Surmonter les échecs

Quand je repense à toutes ces histoires, ça me semble incroyable. En effet mon parcours est parsemé de très nombreux échecs. Force est pourtant de constater qu’il a aussi de quoi impressionner ! Au final, je ne crois pas avoir quelque don particulier. Je n’ai rien calculé et j’ai agis sur l’instant, sans penser aux répercussions, à une suite logique, à une quelconque stratégie anti échec.

Cela dit, si je devais résumer en quelques grandes idées ce qui m’a toujours animé et qui, je crois, a favorisé le fait que mes échecs se transforment en opportunités, les voici :

#1

Se donner les moyens

Mon éternelle rengaine, pour celles et ceux qui me connaissent. Je crois en effet que c’est la base de tout dans la vie. Pour celle ou celui qui veut s’en sortir, aller de l’avant, se relever après un échec, au final la recette est très basique : il faut se donner les moyens.

#2

Se relever, toujours

L’échec est vécu comme une chute. Je sais de quoi je parle. Il me semble que le plus important lorsqu’on tombe, ce n’est pas la chute, ce n’est pas non plus l’atterrissage – n’en déplaise à Kassovitz. Non, le plus important, c’est la résilience, la capacité à se relever, sans cesse.

#3

« Ne jamais blâmer une contrariété »

Il ne s’agit pas d’être défaitiste, mais simplement d’accepter les choses telles qu’elles sont. Si quelque chose ne se passe pas comme vous l’aviez prévu – comme c’est souvent le cas d’ailleurs – ça ne veut pas forcément dire que c’est un échec… souvent, le temps nous montre que c’est tout le contraire. Combien de fois vous êtes vous dit « ohlala, heureusement que je n’ai pas fait ceci, ou cela ! » ? Après tout, nous sommes loin de nous imaginer ce que l’avenir nous réserve !

#4

Adoptez la méthode S.A.M

Je suis ravi de constater que de plus en plus, nous apprenons à tirer profit de nos échecs. Un article récent dans le magazine « Chef d’Entreprise » parle de la méthode pour « Sauter le pas », « Assumer », et « Mettre à profit son expérience »… je ne connaissais pas jusqu’à présent et je vous conseille cette lecture.

« Le succès, c’est se promener d’échecs en échecs tout en restant motivé. »

Winston Churchill

Pour conclure, j’ai eu beaucoup d’expériences différentes dans ma vie. J’ai fait milles et uns jobs et je ne sais toujours pas quel professionnel je serai demain. En effet, avant de transformer l’échec en opportunité, j’ai pris conscience que – peut être comme vous – j’ai une tendance à la « multipotentialité ». Je ne dis pas que je ne changerai pas une nouvelle fois de voie, c’est même sûr que tôt ou tard ça arrivera ; probablement après un prochain échec cuisant d’ailleurs. Ce que je sais de manière sûre en revanche, c’est que si le psy avait raison quant à ma schizophrénie, maintenant nous allons mieux.

Amitiés,

Romain

Photo by Johannes Plenio on Unsplash

Sources :

Insee : Six entreprises sur dix encore actives cinq ans après leur création

Chef d’entreprise : Laissons les 3D derrière nous, longue vie au S.A.M.

Romain Maltrud

Entrepreneur, DAF à temps partagé et auteur de la newsletter "okr, bifton &liberté"